Encore du bleu… Vous allez finir par croire que je suis obsédée par le bleu… J’avoue, un peu, beaucoup! Cet été j’avais prévu de perfectionner mon étude des cuves de fermentations à base de bleu et les choses sérieuses ont commencé en effet!
Une nouvelle cuve de bleu est née dernièrement et est venue rejoindre la petite famille heureuse qui en compte 2 grandes et une petite (celle qui sert en démonstrations). Cette-fois ci, il ne s’agit pas d’indigo d‘Indigofera tinctoria mais de pâte de Persicaire ou indigo japonais (Persicaria tinctoria ou anciennement Polygonum tinctorium), cultivée et extraite avec soin et amour à la micro-ferme des Lilas par Cécilia Aguirre (je vous avais déjà parlé de ce lieu dans cet article). C’est donc une expérience pour voir comment la pâte peut-être utilisée dans une cuve en fermentation (qui je le rappelle ne contient pas de chaux).
Le montage de la cuve a été fait dans de l’eau de cendre avec ajout de son de blé et de racine de garance.
Blue again… You are going to think I’m obsessed by it… I admit, a little, a lot! This summer I will perfect my study of blue fermentation vats and serious stuff has begun indeed!
A new fermentation vat was born and joined the little happy family consisting of two big and another small one. This time it’s not based on Indigofera tinctoria but on Japanese indigo (Persicaria tinctoria or before that Polygonum tinctorium), grown and extracted with much love and care at the Lilas farm by cecilia Aguirre (I wrote about this place here). It’s an experiment to see how this paste extract can be used in a fermentation vat (that doesn’t contain lime). The vat was set up as usual with rainwater and wood-ash lye with madder roots and wheat bran.

Après 4-5 jours, les premiers signes de fleurée ont commencé à apparaître et la réduction de l’indigo dans la cuve était en route. J’allais être maman!
After 4-5 days, the first signs of a flower and some reduction were visible in the vat. I was about to be a mum again!

Comme j’étais en vadrouille de travail en Bretagne, j’ai du attendre de rentrer pour pouvoir enfin faire un premier bain de teinture, une écharpe en coton japonais. Pendant mon absence, la cuve a été bien entendu remuée tous les jours, c’est dangereux de laisser une telle cuve sans surveillance pendant le début de sa vie!
Le premier bain est toujours un grand moment émouvant!
As I was away in Brittany for work, I had to wait to come back home to perform the first dip of the first dye, a Japanese cotton scarf. During my absence, the vat was stirred and monitored every day of course, it’s dangerous to leave a vat like this without surveillance at the beginning of its life!
The first dip is always a big moving moment!

Maintenant il va falloir la faire travailler et voir comment elle évolue dans le temps. Il y a toujours une partie de réduction chimique qui se fait au début avant que les processus de fermentation ne se mette vraiment en place.
Voilà à quoi ressemble dorénavant mon coin extérieur, avec la grosse cuve à base d’indigo indien (120l), la petite cuve de persicaire au centre et la cuve de démonstration tout au bout.
J’espère que les températures vont remonter prochainement, comme ça je ne pourrais les chauffer que la nuit…
Now, the vat has to be worked with and time will tell how it evolves. There’s also a part of chemical reduction going on at the beginning I guess, before the actual fermentation processes really kicks in.
Here’s what my outside dyeing place currently looks like, with the Indian Indigofera-based big 120l vat, the 30l Persicaria vat in the middle and the demonstration vat on the right.
I hope that the weather will get a bit warmer, so I can heat the vats only at night…

Et voici les baguettes magiques… euh pardon, les « touillettes »! Chaque cuve a la sienne bien entendu. j’aime bien avoir de jolis outils pour travailler, chacune est donc choisie et façonnée à la bonne taille. Elles deviennent presque noires avec le temps! Remuer les cuves (ou « pallier » pour employer du jargon de teinturier!) est extrêmement important en teinture indigo et plus particulièrement avec ces cuves-là. Cela assure un bon mélange des différents éléments et homogénéise la température. C’est également un moment durant lequel on peut évaluer l’état de santé de sa cuve: l’odeur, l’aspect de la mousse bleue en surface, l’aspect du liquide etc. tout ça donne des indices importants.
And here are the magic wands… ehhr sorry the stirring sticks! each vat gets its own of course. I like to use nice tools so each is chosen and cut to size. They become almost black with time! Stirring is a very important part of indigo dyeing, especially with these vats. It allows a good mixing of the different interacting elements and is also a time where you can assess the health of your vat: smell, aspect of the blue foam on top, aspect of the liquor etc. all this gives you important clues.

Une ou des cuves en fermentation sont une grande responsabilité, elles demandent du temps et beaucoup de soins! Préférez des cuves à réduction chimique (chaux/fructose/henné ou chaux/fer etc.) si vous n’avez que peu de l’un ou de l’autre! Une fois qu’elles sont en route, il faut idéalement s’en occuper tous les jours et les faire « travailler » (teindre) régulièrement lorsqu’elles sont actives. Ce sont des cuves qui donnent de magnifique bleus solides et avec peu de dégorgement si on les traite bien par contre!
One or more fermentation vats are a big responsibility, they ask for a lot of time and a lot of attention! If you have neither of both, you will be better served by chemical reduction indigo vats (lime/fructose/henna or lime/iron etc.)! Once they are active, these vats must be tended to every day and they like to « work » regularly while they are heated. They give beautiful solid blues with little rub-off when treated well!

J’aimerai faire tout mes bleus en fermentation, mais pour ça, il me faudrait plusieurs cuves de différentes concentrations pour les laines, qui demandent des bains prolongés à ces températures basses, contrairement aux cotons, lins ou soies. Je n’ai pas encore réussi à faire des bleus clairs satisfaisants en fermentation! Et quand j’ai plus de 10kg à teindre dans différentes nuances de bleu, ce qui me prend deux jours avec une cuve à réducteur synthétique me prendrait plus d’une semaine en fermentation. Quand on n’est professionnel, il faut faire des choix… Peut-être un jour avec une installation plus grande?
I would love to make all my blues using fermentation vats, but to achieve this I would need several vats with different pigment concentrations for wool skeins that need long dips unlike cotton, linen or silks because of the low temperatures of fermentation vats. I didn’t manage to get satisfying light blues in a fermentation vat yet! And when I have over 10kg of wool to dye in different shades, what takes me 2 days using a synthetic reduced vat would take me over a week using fermentations. When you are a professional, you have to make choices… Maybe one day with the right bigger set-up?

Il me reste une dernière cuve en fermentation à monter, celle au Pastel (Isatis tinctoria)! Après quelques essais concluants en petit format, le temps est venu de faire plus grand! Mon pigment est enfin arrivé car je n’en produis clairement pas assez pour une cuve de 30 ou 60 litres, mais je vais également utiliser des cocagnes. Le pigment me servira aussi pour d’autres cuves non fermentées.
There is one last fermentation that needs starting, the woad vat! After some successful small scale trials, it’s time to make a bigger one! My new pigment has arrived, because I don’t produce nearly enough for a 30 or 60 litre vat, but I will also use woad balls. The pigment will also be used for other « unfermented » vats.

A propos de Pastel, j’ai également fait ma première extraction de l’année, cette année compliquée en terme de pluies et de manque d’ensoleillement. Le pigment est encore en train de sécher, je verrais combien de grammes j’obtiens avec un kilo de feuilles, mais ça n’a pas l’air trop mal!
Talking about Woad, I made my first extraction of the year, this complicated year in terms of rain and lack of sunshine. The pigment is still drying, I will see how much I get out of a kilo, but it doesn’t look too bad!

Et pour vous prouver que je ne fais pas que du bleu en ce moment, voici des images des dernières teintures. Il y en a d’autres que je n’ai aps prises en photo à cause de la météo vraiment mauvaise… En espérant qu’on ai enfin un semblant d’été!
And to show you that I don’t dye only blue these days, here are pictures of some of the last dyes, I didn’t photograph a lot of them because of the awful weather… I hope the summer will kick in someday!


En ce moment, alors que le monde semble devenir de plus en plus fou dès qu’on regarde dehors et qu’il y a tant de choses autour desquelles se faire du souci, travailler avec ces cuves en fermentation me permet de rester saine d’esprit, presque heureuse et les pieds sur terre. Elles demandent du temps et de la patience, elles nous demandent asussi de nous concentrer et les écouter, nous obligeant à nous consacrer entièrement à la tâche. Du lâcher-prise… Et c’est très apaisant, une parenthèse bleue de chaque jour est devenue quasi indispensable pour moi… Le monde du dehors ne peut venir me hanter lorsque j’ai les mains dans mes cuves et que bain, après bain, la magie du bleu opère.
J’espère que vous avez aussi des occupations qui vous font le même effet, on a tant besoin de ces parenthèses en ce moment, n’est-ce pas?
Prenez soin de vous!
These days, as the world seems to get crzier and crazier and there is much to worry about when you look outside your window, working with fermentation vats keeps me sane, almsot happy and grounded. They need time and patience, they need you to focus and listen to them, requiring that you absorb yourself in the occupation. Letting go… And that’s very soothing, a much needed, almost essential blue break every day… The outside world can’t come haunting my thoughts when my hands are in the vats and, dip after dip, the magic of blue is working.
I hope you also have occupations with the same effet, we really need them these days, don’t we?
Take care!

vos couleurs sont magnifiques! C’est décidé: je mis remets. Merci
Magnifique article, merci pour tes mots Vanessa. Je ne suis même pas fan du bleu en général mais tes histoires de cuves, de bains, de fermentation, de touillage (ces « baguettes magiques » wouaouh !) sont super inspirantes et à la fois apaisantes et motivantes à lire.
Pas du tout la même échelle, mais ca me fait penser à mon kombucha et mes fermentations de concombres !
Tu me donnes fichtrement envie d’aller cueillir de la tanaisie, qui est en pleine folie en ce moment, et d’enfin tester cette plante-là. Mais j’ai plein d’autres choses à faire, o’scour ^^
Merci Emilie!
Je viens de teinter quelques écheveaux à la tanaisie, je trouve que les jaunes qu’elle donne ne sont pas à se rouler par terre, mais les verts kakis avec du fer sont somptueux! (toi qui aime ce genre de teintes!!). Juste qu’il en faut beaucoup, 400g de frais pour 100g de laine.
Merci beaucoup pour les conseils ! Pour le fer tu prends du sulfate de fer c’est bien ca ? Est-ce qu’il y a une manière de faire ca « maison » (comme la « soupe de clous » pour le martelage végétal) ? C’est que j’habite loin de la ville et des boutiques diverses, moué.